Jean
Chapel, directeur de Cabinet du préfet Sabatier
Jean Chapel assuma les fonctions de directeur de cabinet de
Maurice Sabatier. A ce titre il était le seul dépositaire du chiffre qui
permettait à la Préfecture de communiquer secrètement avec Vichy. Jusqu’en
Novembre 1942, l’essentiel des informations importantes transitaient par ce
canal qu’ignorait Maurice Papon.
Signalons aussi que le prédécesseur de Chapel, Reige,
était considéré comme le numéro deux de la Préfecture dirigée par Pierre-Alype.
La lettre de Jean Chapel est adressée à Charles Verny, Vice président du
Comité d’action de la Résistance.
Jean Chapel, témoigna en juin 1981 auprès du jury d’honneur
qui se pencha sur les débuts de l’affaire Papon. Il s’est exprimé sur
Pierre Garat, chef du service des questions juives, nommé à ce poste par le
préfet Pierre-Alype, et maintenu ensuite dans les mêmes fonctions par le
préfet Sabatier. Jean Chapel s’exprime en ces termes :
" 1- Pierre Garat était à notre arrivée à
Bordeaux, le chef du service des questions juives. Je ne connais pas le détail
de ses attributions : c’était en principe les problèmes intéressant
tant les biens que les personnes, tels que les posaient le gouvernement de Vichy…. "
" Ses responsabilités étaient celles d’un chef
de bureau, mais je crois pouvoir ajouter que Garat, qui s’était associé
depuis 1940 à la politique de collaboration du préfet Pierre-Alype, assumait
des responsabilités élargies, allant jusqu’à être en charge des démarches
auprès de la sûreté allemande au Bouscat. Je me souviens assez peu de lui,
car pour nous tous, il était suspect de collaboration ".
" 2- Lucien Dehan. Je n’ai pas gardé souvenir de
lui, si son nom reste bien net dans ma mémoire ".
" 3- Il est possible et vraisemblable, que la
lettre du 22 Mars 1943 de Maurice Papon à l’Intendant de Police était en
effet une pièce de régularisation interne. L’Intendant de police Duchon,
officier honnête et courageux, était en effet plus que soucieux des
opérations que lui faisait mener la politique suivie par le gouvernement,
touchant les Israélites, les communistes, les résistants en général. Je l’ai
souvent entendu demander confirmation écrite au préfet régional ".
" Ces documents de régularisation interne étaient
fréquents et établis après les faits, a cause de l’extrême rapidité d’action
des autorités allemandes, qui intervenaient parfois en pleine nuit auprès de l’Intendant
de police pour exécution immédiate ".
Ce témoignage de Jean Chapel est intéressant à plusieurs
titres.
- Garat est en charge du service des questions juives depuis
l’origine : sous Pierre-Alype d’abord avec le secrétaire général
Delanney, sous Sabatier ensuite avec Maurice Papon. Collaborateur engagé, Garat
fréquente la Gestapo du Bouscat. Papon arrivera à le retourner, mais il lui
faudra beaucoup de temps et beaucoup de patience.
- Chapel confirme le rôle clef de l’Intendant de Police
Duchon, intermédiaire permanent et obligé entre la préfecture et les
Allemands qui s’adressent presque toujours directement à lui, de jour comme
de nuit. Les régularisations administratives s’effectuent après coup, sous l’autorité
du préfet régional.
- La contrainte allemande est à la fois omniprésente et
permanente. Qui rend compte aux Allemands ? La forme prise par les
Allemands pour faire pression sur la préfecture change constamment : rien
n’est jamais acquis avec en toile de fond les déportations et les
exécutions.