5-Arno Klarsfeld s’exprime sur le procès
Extraits de ses déclarations rapportées dans son
ouvrage :
" La Cour, les nains et le bouffon ",
(Editions
Robert Laffont)
Dans ce procès Papon dominé par le sensationnel, il
apparaissait que les parties civiles dépassaient souvent les limites des
débordements oratoires habituellement admis dans un prétoire. Mais ce n’était
que broutilles par rapport aux initiatives des Klarsfeld, qui, assurés de leur
impunité, n’hésitent pas à rendre publics des comportements dont l’ostentatoire
dépasse l’entendement. La mise au pas de la Justice devient pour eux un sport
qu’ils veulent désormais faire partager aux médias.
Nous laissons le lecteur juge en lui présentant quelques
extraits tirés du livre d’Arno Klarsfeld : " La Cour, les
nains et le bouffon " (Editions
Robert Laffont).
Arno Klarsfeld relate en ces termes la façon dont il
interpelle le président Castagnède pour que celui-ci fasse projeter certaines
photos d’enfants déportés :
" Je voudrais que Mmes et MM les jurés sachent qui
étaient les hommes, les femmes et les enfants que les hauts fonctionnaires
comme Maurice Papon contribuaient à envoyer vers la mort. Quand j’ai voulu
projeter les photos des enfants, vous m’avez dit, (le
président Castagnède) :plus
tard. Vous voulez laisser ces gens dans l’enfer de l’anonymat, moi je veux
les en sortir. J’y suis obligé. J’ai en moi une force qui me pousse en
avant. Est-ce que pour vous, Monsieur le Président, il y a des
Juifs " intéressants " et d’autres qui ne le sont
pas ?
Maître Klarsfeld, lance-t-il, (le
président) vous venez d’avoir des
propos qui, dans d’autres circonstances, m’amèneraient à prendre des
dispositions. Je ne tiens pas à montrer ces photos… ".
L’audience est suspendue et l’avocat est convoqué par le
président (Castagnède).
- " Vous comprendrez, maître Klarsfeld que je ne peux
tolérer de tels propos… Je veux que vous les retiriez ".
- " Je suis prêt à les retirer. Il suffit que
vous projetiez les photos et je les retire.
- Comment ! Vous osez me poser des
conditions ! "
La discussion s’envenime et le président la clot par un
mot final : " Dehors ".
Le lendemain matin, Mme Léotin m’appelle :
-" Arno, il faut que vous présentiez des excuses
au président ".
Madame Léotin prend le ton de la confidence :
- " Un jour je vous raconterai toutes les
pressions que j’ai subies sur ce dossier… Il faut que vous teniez bon,
vous êtes indispensable à ce procès… "
- " Indispensable ? Vous voulez dire que le
président compte me virer ? "
- " Rendez-vous compte, c’est le président
tout de même… "
" Quelque chose dans sa voix m’incite à
penser qu’elle n’est pas mécontente de l’incident.
Quelques minutes avant l’audience, l’huissier vient me
trouver.
- Mme Léotin vous attend dans son bureau. Elle m’explique
combien il est important que je reste dans ce procès. Combien je connais le
dossier et fais vivre la mémoire des enfants.
Arrive le procureur général Desclaux, un peu essoufflé
et tout de robe vêtu ".
- " Allons Arno, ce n’est pas grand chose qu’on
vous demande !… Vous savez bien ce que je pense du président, mais les
choses ne vont pas si mal… On avance….Pourquoi tout
compromettre ? "
- " Nous n’avons pas tellement de temps, me dit
le procureur en regardant fébrilement sa montre ".
-" Je ne présenterai pas d’excuses, il n’avait
qu’à montrer les photos ! "
" Assis sur ma chaise, têtu et les bras croisés,
je dois ressembler à un sale gosse capricieux. Madame Léotin a posé ses mains
sur mes épaules, le procureur général est agenouillé devant moi, les plis de
sa robe tombant sur le parquet.
- Arno, je vous parle comme une sorte de père… Mesurez les
conséquences… Vous savez la sympathie que nous avons pour vous… Ce n’est
qu’un geste… ".
" Pris en tenaille entre les deux magistrats, pour
qui je ressens de l’affection, je n’en puis plus. J’écris rapidement
quelques lignes et les tends au procureur …. "
Arno Klarsfeld conclut l’incident en ces termes :
" Mes Juifs intéressants n’étaient pas une
gratuite insolence, mais une poussée stratégique pour contraindre le
président à céder sur ce que j’estimais essentiel.
Trois jours plus tard le président cédera et montrera les
photos. Un procès est parfois une bataille, on ne peut la gagner avec des
amabilités. "
Existe-t-il dans l’histoire judiciaire de ces deux cent
dernières années un tel exemple de justice dévoyée ?
Un procureur général Desclaux à genoux devant une partie
civile, un juge d’instruction (Mme
Léotin) qui, une fois encore,
démontre sa partialité et son engagement.
Comment imaginer après une telle scène qu’il y ait
jamais eu une véritable instruction et un procès équitable !
Arno Klarsfeld, comme son père, exige une justice à sa
botte et s’en glorifie officiellement : dans cette affaire la
réalité dépasse à chaque instant la fiction. Nous avons d’ailleurs une
nouvelle preuve du mépris de l’appareil judiciaire par Arno Klarsfeld lorsque
celui-ci reprend l’avocat général ,
(Marc Robert), qui impute un document
au service des questions juives, alors que Papon soutient qu’il provient de l’Intendant
de Police.
" Regardez, lui dis je, (c’est
Arno Klarsfeld qui parle), Papon a
raison : le document provient bien de l’Intendance… "
" Chut ! me murmura t-il, (c’est
Marc Robert qui parle), vous voulez
donc nous mettre dedans ! "
On reste pantois : l’avocat général ne cherche pas
à savoir si la pièce étudiée est à charge ou à décharge. Avec un peu de
chance, Maurice Papon (qui a 88 ans), a peut être la vue, l’ouïe ou la
mémoire suffisamment affaiblies pour que la fausse accusation soit considérée
comme plausible et s’inscrive dans la mémoire des jurés… et des
journalistes! L’avocat général n’aurait donc pas considéré avoir commis
un déni de justice en chargeant un accusé au moyen d’une pièce qui ne le
concerne pas ! En ne retenant que ce seul fait, comment la magistrature en
général et le procès en particulier pourront-ils être considérés comme
impartiaux par les observateurs extérieurs, et demain par les historiens ?
Reste le président Castagnède, trop incertain aux yeux des
Klarsfeld : son cousinage révélé avec Micheline Castagnède le
déstabilisera de façon définitive. Sans complexe, Arno Klarsfeld relate
comment il a procédé pour obtenir ce résultat.
Première étape : le communiqué des Klarsfeld à la
presse :
" Au cours de l’audience du 28 janvier 1998,
le convoi du 30 décembre 1943 a été évoqué. Lors de cette évocation ont
été lus les noms de Georgette Benaïm, seize ans, Paulette Benaïm, treize
ans, et de leur mère, Louna Elbaz, transférées à Drancy par ce convoi et
déportées sans retour à Auschwitz par le transport 66..La sœur de Georgette
et de Paulette, Esterina Benaïm, a échappé aux rafles et a épousé
Jean-Pierre Castagnède, oncle du président de la Cour d’Assises de
Bordeaux, qui aurait donc pu se porter partie civile contre Maurice Papon. A
notre connaissance, le président de la Cour d’Assises de Bordeaux a évité
de mentionner cette parenté".
Deuxième étape : la manœuvre décrite par Arno
Klarsfeld :
- D’abord l’appel téléphonique de l’avocat général
qui s’exprime ainsi :
"Tel que je le connais, le président va se récuser,
cent pour cent il va se récuser. Et là, je peux vous le dire, ce ne sera pas
du gâteau. Au moins avec Castagnède, on devrait avoir une condamnation, une
condamnation de principe, tandis qu’Esperben se bat pour l’acquittement ".
- Ensuite la prise de position de Maître Varaut l’avocat
de Maurice Papon, qui
dénonce la mise en cause de l’impartialité du président Castagnède…
comme un outrage sans précédent et renouvelle sa respectueuse confiance dans l’indépendance
et l’impartialité du président.
Arno Klarsfeld commente ainsi ce soutien inattendu de Maître
Varaut au président :
" Pourquoi n’a-t-il pas gardé le silence ou
traité l’affaire de façon ironique… Il aurait ainsi témoigné sa
magnanimité de manière bien plus percutante pour les jurés. Varaut n’est
pas bête ; cependant il existe un sentiment qui rend chacun bête :
la peur. Varaut a eu peur. Son intervention n’était pas celle d’un avocat
défendant son client et utilisant au mieux tous les incidents en sa faveur; sa
réaction a été celle d’une partie concernée ".
- Enfin la réunion du CRIF ,
qui a lieu sous la présidence d’Henri Hadjenberg,, de son vice-président
Michel Zaoui, et du comité exécutif,(dont fait partie Serge Klarsfeld). Le
CRIF ne veut pas la récusation du président. Magistrats, parquet et syndicats
exigent des poursuites, mais le garde des Sceaux s’y oppose en ces termes :
" Il est très mauvais qu’il y ait un procès
dans le procès ".
Conclusion d’Arno Klarsfeld .
" Le procès avait changé de physionomie. Le
président interrogeait Papon avec plus de fermeté, Varaut s’en plaignait… "
" Il, (Varaut),
avait commis la faute de voler au secours du président…. "
Où est le Droit dans ce procès ? Impunément violé, il
n’en subsiste que la forme et ses pompes avec des tribunaux et des magistrats
qui siègent… Dans la première " contre-enquête ", nous
déplorions le crépuscule de l’Etat de Droit, mais il semble avoir déjà
plongé dans les ténèbres lorsqu’on a lu l’ouvrage d’Arno Klarsfeld.
Livre à ne pas manquer comme dirait le critique.
Rappel de la déclaration de Serge Klarsfeld, le 11 février,
sur radio Shalom
Cette déclaration avait été citée dans notre première
contre-enquête, mais elle semble devoir être rappelée, car elle complète et
précise l’idée que se fait la famille Klarsfeld de la justice.
" Et bien ces magistrats ont été nommés aussi
par des hommes qui peuvent avoir un point de vue favorable à l’enterrement de
cette histoire de Vichy, un point de vue opposé à celui de Jacques Chirac. On
l’a vu parmi de nombreux témoins, à fond contre Chirac...
Nous nous battons pour les repousser, les ligoter ou les
mettre sous surveillance, c’est ce que nous avons fait avec le Président et
effectivement, aujourd’hui, nous voyons que la défense de Papon se plaint du
comportement du Président qui a pris la direction que nous voulions lui
imprimer.
Jean-Marc Varaut se plaint du Président qui est aujourd’hui
obligé de prendre une direction différente de celle qu’il avait imprimée au
procès.
Nous ne voulons pas que le procès se passe dans le
"meilleur esprit", puis, après, une indignation générale contre le
verdict...
Nous voulons intervenir avant, pour empêcher les
événements de devenir ce que normalement ils devraient être et pour imposer
notre volonté.
Et quand on parle de "l’État de Droit", je
regrette, mais lors du procès de Cologne, on a déclenché le premier jour une
bataille rangée de deux cents personnes contre les policiers, de façon à
montrer que les maîtres du terrain c’était nous, c’est-à-dire, que si le
procès n’était pas exemplaire et bien le procès n’aurait pas lieu...
Ce que le Président a bien compris; le procès (de Cologne)
a été exemplaire. Ils ont bien compris ce que signifiait cette épreuve de
force."
Comment peut-on encore parler d’État de droit lorsqu’un
individu peut impunément menacer la justice et mener de telles actions d’intimidation
?
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